Un aperçu du social marketing de demain

Le 25 avril 2010

Un cabinet de conseil suédois utilise les réseaux sociaux pour cibler au mieux ses clients potentiels. L'avenir du marketing social, ou pas. Lol.

Titre original :

Mythmänsc Social Spy – Un aperçu du social marketing de demain

C’est au salon  RSCIMNUC, pour “Réseaux sociaux  et Construction d’une Identité de Marque à travers des Nouveaux Usages en Communication”,  la semaine dernière à Paris, que j’ai écouté Avrö Mithmansc, community manager suédois, conférencier sur l’événement. Sa présentation était axée sur l’usage des réseaux sociaux dans la dynamisation des ventes du rayon “Arts de la Table” d’une chaîne suédoise dédiée à l’ameublement à prix abordable.

Avrö y expliquait comment, via une stratégie communautaire adaptée, la chaîne avait réussi à augmenter de 2% sur l’ensemble du territoire suédois la marge brute du rayon “Arts de la table” –sur lequel s’est concentré l’expérience- en seulement quelques semaines.

Avrö Mithmansc

Une petite équipe passionnée

Le cabinet de conseil en réseaux sociaux Mithmansc Social Spy (MSS) est composée de quatre membres permanents basés à Stockholm. Il regroupe, en plus du charismatique Avrö, un chef de projet, un développeur/hacker  et un sociologue appelé Social Media Watcher. MSS travaille également avec une batterie de veilleurs freelances dont le nombre n’a pas été évoqué pendant la conférence.

Le principe de l’agence est simple : en analysant adéquatement certains échanges sur les réseaux sociaux et en y intégrant certains ferments conversationnels, il est possible de faire converger certains destins à court terme pour la conversion de prospects en acheteurs conventionnels. Soit un mélange de brand management et de longue traîne pour ceux d’entre vous à qui ces termes marketing parlent.

Le discours de la méthode

Lors de son allocution, Avrö a mis en lumière le processus mis en place pour la chaîne suédoise:

1° Le préalable

MSS a établi un réseau étroit de partenariat commercial avec Google Suède, Facebook et la régie Twitter récemment créée. Par ce biais, la petite structure suédoise obtient au meilleurprix certains éléments utiles au profilage de ses prospects cibles. Soit plusieurs centaines milliers de personnes adeptes des réseaux sociaux. Par recoupements successifs, (et sans doute des heures de recherche pour confirmation de profil via les moteurs de recherche) MMS remplit les champs de son logiciel propriétaire de profilage de clients-cibles.

Ce profil est établi conjointement par la marque-annonceur et le sociologue de l’agence.  Peu d’éléments de définition de profil, véritable trésor de guerre de l’agence, ont filtré. Il est difficile avec nos yeux français et la maigre quantité d’informations données par l’orateur de déterminer avec certitude la pertinence de ces profils, ou d’évaluer si ces données sont conformes avec la législation et la CNIL en France.

Quelques éléments ont filtré dans le cas de la marque suédoise. Cible 30-35, urbaine ou péri-urbaine, CSP+ pour une partie, CSP- pour une autre partie. En couple depuis 5 à 7 ans. Relation compliquée, sans enfants ou avec un seul enfant à charge.

Ces données sont semble-t-il recoupées via analyse des profils facebook, CV en ligne et requête ONETWOTHREEGENS société de collecte d’informations personnelles (obscures) récemment rachetée par les pages jaunes en Suède.

A cette analyse primaire de la cible sont ensuite rattachés un certains nombre d’éléments récupérés sur la statusphère (Twitter, statusnet, blogs perso, foursquare…) permettant de consolider le profil. Peu d’éléments ont été annoncés. Mythmansc a néanmoins avancé des méthodes de type” moteur search” de ces différentes plateformes sur certains mots clés (fais chier, n’en pouvoir plus, agacement, trompé, salope….), analyse des situations amoureuses (it’s complicated, passages inexpliqués de in a relationship à it’s complicated à haute fréquence etc. Nous n’en saurons pas plus sur les méthodes de consolidation. Il semble d’ailleurs, mais c’est notre perception, que le développeur russe de l’entreprise portait le chapeau: noir présage d’efficacité dans la recherche).

Le développeur russe inspire confiance

2° La méthode

Une fois déterminés les profils consolidés, MSS démarre la campagne de communication en réseaux sociaux.

a)      L’engagement. Une fois la cible marketing définie, les freelances entrent en scène. Ils engagent la conversation avec les profils. En fonction du niveau de « privacy » des différents profils , ils passent par l’un ou l’autre biais. Bien que Mythmansc soit resté évasif sur ses méthodes d’engagement, on peut imaginer que les pigistes MSS démarrent une relation d’amitié virtuelle avec la cible, visant à être identifié de cette dernière non comme un Spam user, mais comme un ami virtuel et 2.0 récemment connecté. Ceci semble passer aussi par certaines méthodes automatisées, le “reply” automatique de phrases standardisées, le “retwitt” algorythmé etc. Le principe étant que la cible pense avoir affaire à un fan virtuel ou un clavardeur  / fan virtuel, être de chair et de sang derrière son ordinateur.

b)      La période de communication : le logiciel de scan des profils semble assez puissant. Défini en collaboration avec le sociologue et amélioré par l’expérience des différentes campagnes,  il semble capable d’alerter les Social Media Watchers de certaines phrases type rédigées par le prospect. Ce repérage génère des alertes sur le plateau de pigistes. Ils savent alors qu’il est temps d’engager la cible de manière plus personnalisée mais avec un but unique. L’exemple donné lors de la conférence, me semble parlant (surtout parce qu’on l’imagine degré zéro de la procédure) à un certain Stieg Larrstred qui annonce sur son profil Facebook :

« j’essaie, mais je ne vois plus de raison de continuer cette mascarade »

Mick89 employé MSS répond alors

« en effet, ca semble très compliqué. Mais pourquoi t’infliges-tu cette vie aussi ? »

Mithmansc a ensuite expliqué comment, de fil en aiguille, les pigistes parviennent à établir une relation, sinon de confiance, au moins un relationnel positif avec la cible. La cible  conserve le pigiste dans sa liste d’amis / Connaissances. Ce qui permet à ce dernier de subtilement  (le logiciel capte le nombre de messages de ce type par semaine) instiller l’idée  du départ et de la rupture dans l’esprit de la cible marketing.

Mithmansc n’a pas donné d’exemple de message qui ont pu conduire à une rupture, mais il a précisé que les commanditaires des campagnes MSS peuvent accéder à l’ensemble des échanges et ont pu constater par eux-même l’efficacité de MSS.  On ne peut qu’imaginer les messages incitant la cible à quitter son partenaire, à refaire sa vie ailleurs et à accélérer cette décision de « recommencer une nouvelle vie ».

Quelques questions dans la salle ont évoqué la moralité douteuse de la procédure. Avrö s’est défendu en argumentant que MSS ne fait que s’insérer dans un processus déjà imaginé par la cible, que l’entreprise ne  fait que concrétiser par le biais des pigistes MSS. Il a, non sans cynisme,  avancé que MSS  est par ailleurs capable d’alerter les services d’urgence ou spécialisés quand pigistes et logiciels repèrent des comportements dépressifs ou suicidaires.

c)       La relance marketing

Une fois la cible décidée à quitter son conjoint, il ne reste plus à MSS qu’à transmettre ses coordonnées complètes à son partenaire commercial. Ces derniers choisissent l’appel via plateau de télé-conseillers, courrier au nouveau domicile, ou e-mailing standard.  Le rôle de MSS se termine à ce moment précis, quand le premier contact est établi par le partenaire commercial avec la cible définie par l’agence.

d)      L’acte d’achat

Le partenaire commercial de MSS met ensuite en branle l’arsenal marketing  habituel. A la seule différence que le segment  commercial est ici défini à 100% dans la cible. MSS a évoqué la marque d’ameublement suédoise pour que l’auditoire comprenne bien l’enjeu et le rôle de MSS dans l’acte d’achat. Une personne récemment  séparée se retrouve forcément dans l’obligation de retrouver un nouveau logement.

Un nouvel appartement ou maison, que ce dernier est contraint et forcé de remeubler, réorganiser (cuisine, vaisselle…), réinstaller. Canalisé par une marque, appâté par quelques bons d’achat ou par une démarque intéressante, il y a exactement 87% de chance de transformer un prospect en client.  CQFD. Et MSS de justifier ses honoraires.

A la fin de son allocution, il régnait un silence de plomb dans la salle, étonnant  pour ce genre de conférences qui accumulent les orateurs à l’intérêt parfois douteux.  J’ai ensuite vu Mythmansc discuter avec les responsables marketing d’un voyagiste national, et du responsable marketing d’un éditeur de solutions pour mobile.

Pour ma part j’ai beaucoup glosé de la moralité de ce community management d’un nouveau genre, avec les quelques blogueurs présents dans la salle. Et je me suis demandé si je n’avais pas assisté là aux prémices du community management et du marketing  social appelé à se développer dans les années à venir, au gré des réseaux sociaux dont le succès ne se dément pas.

J’ai admiré l’efficacité de l’entreprise. Mais je dois reconnaître que j’ai eu un peu moins foi en l’Internet de demain

P-s : et si vous avez cru à celle-là… c’est bon, vous êtes mûrs pour les reportages télé sur les méfaits du vilain web. /-)

> Article initialement publié sur le blog d’Emgenius

> Illustrations par villoks, re:publica10 et mringlein

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