Hadopi : La lutte de l’empire

Le 3 mai 2009

En 2007, Thierry Desurmont, Vice Président du Directoire de la Sacem évoquait sous l’euphorie du moment l’accord signé avec Deezer: “Nous sommes très satisfaits d’avoir signé cet accord avec Deezer qui permet non seulement de favoriser de nouvelles formes d’expressions mais surtout d’assurer de nouvelles rémunérations pour les auteurs.” Pour un petit rappel, Dezzer naît de [...]

En 2007, Thierry Desurmont, Vice Président du Directoire de la Sacem évoquait sous l’euphorie du moment l’accord signé avec Deezer: “Nous sommes très satisfaits d’avoir signé cet accord avec Deezer qui permet non seulement de favoriser de nouvelles formes d’expressions mais surtout d’assurer de nouvelles rémunérations pour les auteurs.

Pour un petit rappel, Dezzer naît de Blogmusik, un site pirate de diffusion de musique en streaming…. Au printemps de 2007, ce site musical ferme sous la pression de la Sacem pour renaître sous le nom de Deezer, avec l’accord de la même Sacem.

Aujourd’hui, la rémunération de Deezer aux producteurs est trés faible : 22, 85 euros pour 24 185 écoutes. Deezer reverse environ 6% à 8% de ses revenus à la Sacem qui ne s’en satisfait pas. Deezer n’a d’autre choix que de rajouter toujours plus de pubs ou de passer en mode payant… Triste sort que celui de la culture contrainte à s’afficher constamment avec des marques de chaussures et de voitures pour exister.
Les internautes ne paieront pas, ils iront juste voir ailleurs…

Il est rare que ces internautes fassent un usage commercial des musiques qu’ils téléchargent.
On peut trouver normal que celui qui fait une utilisation commerciale d’une oeuvre partage ses revenus avec l’artiste, mais pourquoi faire payer les mélomanes?

La culture, selon M. Sarkozy, doit se “moderniser” et obtenir “une obligation de résultats” (de l’argent). Mais le débat sur l’art ne doit pas se poser en ces termes-là… ne lui imposons pas une logique de rentabilité, c’est dangereux pour sa survie. Ainsi, seul l’art “fast food”, massivement appréciable, survivrait au détriment de l’art d’auteur et d’essai, expérimental, d’avant-garde

Mais ces formes d’expression artistique entrent dans la catégorie du “non profit”, ce qui est absolument inconcevable dans une logique capitaliste. Avec un gouvernement actuel menant une politique de “droite dure”, ce “non-profit” sera persécuté, stigmatisé et puni.

La Sacem devrait certainement se questionner sur le modèle économique qu’elle a largement promu au lieux de jetter la responsabilité “de la dégradation dramatique des revenus des ayant droits” sur les internautes mélomanes.

Pour revitaliser la conditions des artistes et de la création, il faut aller chercher l’argent ailleurs que dans l’art lui même. Au lieux de poser les débats sur l’internet et la culture comme l’opportunité de donner une nouvelle dynamique à un secteur en crise (le revenu moyen des artistes est environ 37 % inférieur à celui de l’ensemble de la population active), le gouvernement préfère mener une politique répressive qui de surcroit n’est pas avantageuse pour la création.

Il existe des solutions alternatives, en voilà une et ce n’est pas la seule :
Il existe environ 19 millions de lignes haut-débit en France. Un augmentation de 3 euros de la facture internet mensuelle générerait 57 millions par mois et 684 millions par an, ce qui permettrait à la Sacem de doubler les distributions annuelles. Cette somme équivaudrait à près de 6 fois les versements de l’industrie du disque et du vidéodisque. Cela serait une redevance, comme pour l’audiovisuel public.

Le débat actuel autour de l’avenir de l’industrie de la musique n’est pas, contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire, celui de la protection des artistes et de la création.
Nous sommes les témoins de la lutte de l’empire des majors et des éditeurs, face à l’émergence d’un nouvel ordre économique mondial généré par le numérique basé sur une notion pourtant pas si nouvelle: le partage.

Olivier Samouillan

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