OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Vidéosurveillance dans les lycées: “les résultats sont décevants” http://owni.fr/2010/04/07/videosurveillance-dans-les-lycees-les-resultats-sont-decevants/ http://owni.fr/2010/04/07/videosurveillance-dans-les-lycees-les-resultats-sont-decevants/#comments Wed, 07 Apr 2010 09:20:19 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=11685

Image CC Flickr by sa treehouse1977

Pourquoi utilise-t-on la vidéosurveillance dans les lycées ? Comment s’en sert-on ? Est-elle utile ? Pour répondre à ces interrogations, et alors que les évaluations sur le sujet étaient rares en France, la Région a demandé une étude sur la vidéosurveillance dans les lycées d’Île-de-France, réalisée par l’Institut d’aménagement et d’urbanisme (IAU) IDF et publiée en 2007.

Cette analyse comparative portait sur dix lycées, pourvus ou non de caméras. Elle dresse un premier bilan sur une technique mise en place depuis 1998 par la Région, en réponse à l’augmentation des faits de violence et d’incivilité dans les établissements, aux côtés d’autres mesures de sécurisation, dispositifs de contrôle d’accès, alarmes anti-intrusion, etc. À l’époque, plus de la moitié des établissements étaient déjà équipés, mais seulement 10% étaient pourvus d’un véritable système quadrillant aussi bien l’intérieur que l’extérieur.

Tanguy Le Goff, qui a dirigé cette étude, revient sur ces résultats qui restent d’actualité, tendance du gouvernement au tout-sécuritaire oblige.


La conclusion qui ressort de votre étude, c’est que la vidéosurveillance coûte cher, 700.000 euros par an, pour un résultat limité.

Par rapport à l’objectif officiel, qui était de lutter contre les intrusions, oui, les résultats sont décevants. On constate en effet qu’en dépit de la mise en place de cet outil, les intrusions continuent. En tant que moyen de dissuasion, de prévention de la délinquance, ce n’est pas efficace.

En revanche, sur d’autres points, les résultats sont plus positifs, même si c’est un élément difficile à déterminer, via des données chiffrées, notamment policières, nous l’avons mesuré surtout au travers de témoignages de gens que l’on a pu rencontrer. De manière assez classique, il y a une efficacité reconnue sur les parkings, cela aurait tendance à faire diminuer les vols de deux-roues et les dégradations de véhicule.

Le manque de réflexion lors de l’installation des dispositifs explique aussi le peu d’efficacité…

Effectivement, il faut poser la question en terme d’usage : comment l’ensemble de la communauté éducative va s’approprier cet outil et que va-t-elle en faire ? Or bien souvent, on constate que la vidéosurveillance a été posée dans l’urgence, dans la mesure où il s’agissait parfois de répondre à une inquiétude, une émotion extrêmement forte de la part des professeurs, des conseillers principaux d’éducation (CPE), parce qu’il y a eu par exemple un enseignant agressé à l’intérieur de l’établissement.

Pour rassurer, on va mettre en place cet objet sans se demander qui va l’utiliser, comment se fera le lien avec le personnel de surveillance, l’agent d’accueil, le personnel de direction. La difficulté, c’est que le personnel ne se l’est pas approprié. Souvent, l’outil est posé au sein d’un établissement, sans que l’on ait réfléchi à la façon dont il va appuyer la politique de sécurité de l’établissement. On en fait donc un usage limité, d’autant plus qu’on en donne souvent la responsabilité à un agent d’accueil, qui n’est pas un agent de l’ordre, il a d’autres missions à accomplir que de regarder les caméras, il le fait donc de manière très épisodique.

Pourtant, la vidéosurveillance est de plus en plus considérée comme une solution aux divers problèmes d’insécurité rencontrés dans les établissements.

C’est vrai, il y a une demande assez récurrente des chefs d’établissements, pour différentes raisons. Déjà, ils pensent que cela va vraiment être utile pour dissuader. Par ailleurs, il y aussi l’idée que les caméras servent à pallier des déficits en matière d’aménagement technique. Ils croient par exemple qu’un lieu mal conçu, que des personnels peuvent difficilement surveiller, sera ainsi sécurisé, alors que c’est un leurre total.

Ceci dit, ils ne sont pas complètement dupes, ils se rendent bien compte, en matière de prévention des vols, que l’efficacité est limitée.

La vidéosurveillance fait partie d’une politique générale de sécurisation des établissements centrée sur la protection contre la menace extérieure, dont vous soulignez les effets pervers.

Oui, d’une part, la logique de clôture de l’établissement a tendance à engendrer un désintéressement du personnel de surveillance pour ce qui passe au-delà des grilles, alors que l’on voit bien que très fréquemment, la plupart des difficultés se jouent vraiment dans l’espace entre le lieu de transport et le lycée, bien souvent son parvis.

Les CPE nous expliquaient que cela ne relève pas forcément de leur compétence, légalement, mais que du coup, du fait de cette logique de fermeture, il y avait un désinvestissement progressif de ce qui pouvait se jouer dans les alentours immédiats de l’établissement. Ce repli est un effet négatif qui n’avait sans doutes pas été imaginé initialement.

Cette logique peut aussi générer une opposition systématique entre le quartier où il se trouve et le lycée, alors qu’auparavant, un certain nombre de lycées étaient considérés comme des espaces qui pouvaient être traversés par la population, c’est-à-dire que l’on allait d’un lieu à un autre en passant par lui. Aujourd’hui, de plus en plus, et on peut le regretter, il devient un lieu à part, a-territorial.

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Image CC Flickr It's Greg

Quelles sont vos recommandations pour que la vidéosurveillance soit utilisée à meilleur escient ?

Nous avons rassemblé dans un cahier des charges nos préconisations. Déjà, avant même d’aller sur la mise en place de caméras, se demander s’il n’y a pas d’autres solutions envisageables : ce peut être des mesures d’aménagement de l’espace, de déplacement du lieu d’accueil, permettant d’avoir une surveillance plus naturelle. Parfois, on s’aperçoit que la loge ou le lieu de vie des enseignants est complètement décalé de l’entrée, ce qui fait que cette dernière n’est pas surveillée. Ces aménagements pourraient à eux seuls contribuer à assurer la sécurité. Cela passe aussi par un nouveau mode d’organisation du travail effectué par les CPE.

Une fois que le recours à la vidéosurveillance a été préconisée, certes il y a des enjeux techniques, mais ils représentent une part minimes, mais au-delà, il faut surtout s’interroger sur l’organisation de l’ordre scolaire et déterminer qui fait quoi, qui va avoir la charge du dispositif. Par exemple, dans le cas d’un agent d’accueil, comment il agit lorsqu’il repère un fait sur une caméra : avec qui doit-il interpeller, que fait-on de ces données, faut-il les transmettre à la police, de quelle manière, comment informe-t-on la police, les parents ? On a en effet constater que ces derniers et les lycéens n’étaient pas toujours informés de la présence des caméras, comment informe-t-on ? On ne pose pas un objet à la va-vite, il faut se poser la question de son intégration au sein d’une politique  de sécurité et de la manière dont on va être en mesure ou non de l’approprier, pour faire en sorte au moins que les usages de cet outil soient au maximum valorisés.

Vous avez réalisé cette étude voilà trois ans : comment la situation a évolué depuis ?

En France, je n’ai pas de données, la vidéosurveillance dans les lycées ne dépend en effet pas de la loi Pasqua de 1995 mais la loi Informatiques et Libertés de 1978, car ils sont considérés comme des espaces privées. C’est donc la Cnil qui est compétente et une simple déclaration est nécessaire. En revanche,  si un certain nombre de caméras visionnent des espaces publics, il faut une demande à l’autorité préfectorale.

Ce qui est sûr, c’est quil y a une politique gouvernementale qui pousse au développement de cet outil. Le financement provient directement de l’État via des budgets donnés à l’Éducation nationale et donc aux lycées, ou des régions.

En IDF, je ne possède pas non plus de données depuis. En tout cas, comme nous avions mis en place un cahier des charges, qui est aujourd’hui respecté,  les démarches sont sans doutes un peu plus longues pour la mise en œuvre de la vidéo, et donc plus pensée, il y a sans doute eu plus de vigilance.

Y a-t-il des pays  qui encadrent mieux le recours à la vidéosurveillance ?

Au Canada, et c’est un peu ce que nous avons développé ici avec les lycées, pour pouvoir installer de la vidéosurveillance, et notamment dans les espaces publics, il faut prouver qu’il n’y a pas d’autre solution plus efficace.

Télécharger ici l’étude intégrale

Voir aussi l’intégralité de notre dossier sur le sujet, où il est entre autre question de la mise en place de portiques de sécurité, du fait que la vidéosurveillance est tellement développée, en Grande-Bretagne, qu’on y trouve des caméras, non seulement dans les salles de classe, mais également dans les toilettes de 10% des écoles :

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Vous voulez des pions ? Vous aurez des ex-policiers http://owni.fr/2010/04/06/vous-voulez-des-pions-vous-aurez-des-ex-policiers/ http://owni.fr/2010/04/06/vous-voulez-des-pions-vous-aurez-des-ex-policiers/#comments Tue, 06 Apr 2010 08:17:00 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=11505 Photo Flickr CC gardenghelle

"Toute l'adolescence est perçue comme suspecte" Photo Flickr CC gardenghelle

Accompagnement du diagnostic de sécurité, prévention en cas de tension, sécurisation“. Telles sont les principales missions des équipes mobiles de sécurité (EMS). Mais dans quelles zones dangereuses agissent-elles ? Les quartiers pauvres de Baltimore filmés dans The Wire ? Des banlieues au bord de l’émeute ? Non, dans toutes les académies de la douce France.

Les quarante équipes sont en place depuis mercredi dernier.  Les EMS constituent un des quatre volets majeurs du plan de “sanctuarisation des établissements scolaires” lancé en septembre dernier. Une riche idée de Xavier Darcos, mise en oeuvre par son successeur à l’Éducation nationale Luc Chatel, conjointement avec le ministre de l’Intérieur (et pourquoi pas celui de la Défense, tant qu’on y est ?).

Il s’agit d’équipes mixtes composées de personnels de l’Éducation nationale -proviseur, CPE, enseignants, infirmière…- et de “spécialistes de la sécurité issus d’autres ministères ou des métiers de la sécurité“. Comprendre des ex-policiers et gendarmes.

Le dosage de sa composition est variable en fonction des zones d’intervention. L’ensemble des membres  doivent recevoir une formation “adaptée aux spécificités des interventions en milieu scolaire.” Les EMS sont placées sous l’autorité du recteur d’académie qui travaille maintenant avec un conseiller technique “sécurité“, issu de la police ou de la gendarmerie par exemple. C’est sur saisine du rectorat qu’elles interviennent.

L’argument avancé, on s’en doute, pour la mise en place de ces EMS, c’est l’augmentation de la violence à l’école sous différentes formes. Toute un arsenal sécuritaire destinée à… “restaurer la confiance et le dialogue” -cherchez l’erreur- et “conforter l’autorité dans les établissements en proie aux tensions” -là c’est plus logique. Pour retrouver la sérénité, c’est bien connu, embauchez du personnel possédant une « présence physique imposante et forte visibilité, [...] des aptitudes physiques et sportives (ex : pratique des arts martiaux) avérées ».

“Des pompiers pyromanes”

Un discours qui laisse dubitatif les premiers concernés. En Seine-Saint-Denis, département de l’académie de Créteil réputé difficile, et qui avait à ce titre inauguré le dispositif, la FCPE, première fédération de parents d’élèves, a parlé de “rustine sur un pneu crevé”.

Au lycée Le Corbusier d’Aubervilliers (93), enseignants et personnels ont fait grève, “indignés par l’absence totale de concertation et la non prise en compte de [leurs] demandes et des besoins réels.” Idem au lycée Aubrac de Pantin (93), où des enseignants avaient débrayées en janvier.

Dans une académie plus calme, celle de Toulouse, même opposition : « Cette unité est une unité que nous ne reconnaîtrons pas. Ils nous fabriquent une problématique là où il n’y en a pas. Ce sont des pompiers pyromanes : après avoir enlevé 100 000 personnes dans l’Éducation nationale il ne reste pas assez d’adultes dans les établissements » a expliqué Pascal Astruc, président de la FCPE 31.

Et Pierre Granet, secrétaire général de la FCPE 31 de fustiger cette politique du gouvernement selon laquelle « toute l’adolescence est perçue comme suspecte. Sélectionner, surveiller et punir, voilà la logique. Avec un contrôle social des populations supposées à risque qui n’est pas acceptable. La stigmatisation ne fait qu’envenimer les choses ».

Luc Chatel : «99% des élèves ne connaissent pas la violence»

Face à l’augmentation de la  violence, quelles solutions autres apporter ? Suite à la mort de Hakim Mahdi, un élève poignardé dans l’enceinte de son établissement, le lycée Guillaume-Apollinaire , les professeurs avaient demandéplus de moyens humains : des surveillants et des professeurs qualifiés“. Tout simplement : à quoi bon des États généraux si la solution est connue ?

D’ailleurs Luc Chatel lui-même a déclaré que «99% des élèves ne connaissent pas la violence». Alors pourquoi une telle débauche de moyens axés sur la sécurité ? Vous avez dit “communiquer” ?

40 000 postes supprimés depuis l’élection de Nicolas Sarkozy

Sourd à la demande, le gouvernement a prévu de supprimer 16 000 postes dans le budget 2010, conformément à la règle du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux. Ce qui devrait porter à 40 000 postes le nombre total de postes de l’Éducation nationale supprimés depuis l’élection de Nicolas Sarkozy, essentiellement des enseignants.

Lors de son intervention à l’occasion de la rencontre nationale des responsables des EMS, Luc Chatel a évoqué la mort de Hakim, qui ne risque pas de se plaindre de cette récupération : “Sa mort est la négation des valeur de l’École de la République, fondée sur la tolérance, sur le respect de l’autre“. La défiance a priori fait-elle désormais partie du socle commun transmis à l’école ?

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Voir aussi l’intégralité de notre dossier spécial à l’occasion des États généraux de la sécurité à l’école, où il est entre autre question de ces adolescents envoyés en prison, aux États-Unis, parce que des policiers y ont remplacé les surveillants, de la mise en place de portiques de sécurité…

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Le WebcamGate http://owni.fr/2010/04/03/le-webcamgate/ http://owni.fr/2010/04/03/le-webcamgate/#comments Sat, 03 Apr 2010 10:00:21 +0000 Philippe Quéau http://owni.fr/?p=11539

roberto kusterle5

Blake Robbins, un élève de l’école Harriton, habitant à Penn Valley, près de Philadelphie, vient de déclencher un véritable scandale, déjà nommé le « WebcamGate », en accusant les responsables de son école d’avoir activé à distance la webcam de son portable pour l’espionner dans sa chambre.
Cette webcam est installée sur son MacBook, qui lui a été attribué par l’école ainsi qu’aux autres élèves.


Tout a commencé en novembre dernier, quand Blake Robbins, âgé de 16 ans, s’est vu reprocher par l’un des responsables de l’école, M. Lindy Matsko, de s’être livré à des « pratiques impropres » à son domicile. Pour étayer cette affirmation, M. Matsko aurait produit des photos prises à distance par l’intermédiaire de la webcam, et qui montrait le jeune Blake en train de manipuler deux « pilules », qui seraient en fait des substances illégales. La famille de Blake a affirmé que ce n’était que des bonbons.

L’affaire a pris un tour très sérieux, avec le dépôt d’une plainte des parents au nom de Blake et des 1800 autres élèves utilisant les mêmes ordinateurs portables dans ce district scolaire.


Le FBI a lancé une enquête. L’Electronic Frontier Foundation s’est aussi lancé dans la bataille, et a témoigné devant le Congrès pour que de nouvelles lois protégeant la vie privée soient adoptées contre la vidéo-surveillance cachée.

Espionner des jeunes élèves dans l’intimité de leurs chambres, par le biais de leurs webcams, offre un énorme potentiel aux gens malintentionnés… Je n’ai pas besoin de vous faire un dessin.

Que cette affaire ne soit qu’un cas exceptionnel, ou bien qu’elle révèle un phénomène plus ample, aujourd’hui rampant, mais en voie de généralisation, est une question qui vaut la peine qu’on s’y arrête.

Je pense que ce que révèle aujourd’hui le WebcamGate n’est qu’une amorce d’un mouvement global vers la transparence absolue des vies aux regards panoptiques, inquisiteurs des éducateurs, des policiers, des agents de toute obédience,… et aux actions variées des malfaisants de toutes sortes.

Rien de nos vies ne doit plus échapper au « système » panoptique


L’idée de transparence est très calviniste. Les êtres purs n’ont pas besoin de rideaux aux fenêtres. Mais aujourd’hui Calvin offrirait lui-même une certaine opacité par rapport aux normes contemporaines !

La tendance lourde (rendue évidente par l’alliance objective entre le « tout-sécuritaire » et les immenses profits techno-post-industriels de l’appropriation mercantile du domaine personnel) est que rien de nos vies ne doit plus échapper au « système » panoptique, pan-acoustique et pan-gnostique que nous renforçons volontairement année après année.

Généralisons. La société tout entière est en train de devenir l’otage d’une accumulation inouïe de données, et d’images personnelles, favorisée par des techniques d’intrusion de plus en plus violentes, systématiques et radicales, le tout étant favorisé par une sorte d’idéologie crypto-calviniste, selon laquelle seuls ceux qui ont quelque chose à se reprocher ou à cacher peuvent vouloir exiger des lois fortement répressives et dissuasives contre toute atteinte à la vie privée.


Les bonnes âmes, elles, n’ont pas besoin de telles lois. Elles préfèrent même collaborer au système de purification générale.

> Billet initialement publié sur Metaxu

Voir aussi l’intégralité de notre dossier sur le sujet, où il est entre autre question de ces adolescents envoyés en prison, aux États-Unis, parce que des policiers y ont remplacé les surveillants, du fait que la vidéosurveillance est tellement développée, en Grande-Bretagne, qu’on y trouve des caméras, non seulement dans les salles de classe, mais également dans les toilettes de 10% des écoles :

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USA: un pion ça donne des colles, un flic, ça fout en taule http://owni.fr/2010/04/02/pion-colles-flic-taule/ http://owni.fr/2010/04/02/pion-colles-flic-taule/#comments Fri, 02 Apr 2010 08:24:43 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=11413 Aux États-Unis, l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) déplore un déploiement inquiétant de forces (et de technologies) de sécurité à l’école...

Votre téléphone sonne à l’école ? Vous devriez finir en prison. Le raccourci est certes un peu rapide, mais c’est l’un des scénarios décrit par l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), dans School-to-Prison Pipeline Game, un “jeu” créé pour dénoncer les effets de la policiarisation des établissements scolaires au Texas, et le fait qu’un nombre croissant d’écoliers passe directement de la case école à celle de la prison.

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Pour l’ACLU, il s’agit de l’un des principaux enjeux, en terme de droits de l’homme, auxquels sont aujourd’hui confrontés les États-Unis“.

Alors que les “états généraux de la sécurité à l’école“ ouvrent les 7 et 8 avril, il est intéressant de regarder ce que le déploiement de forces (et de technologies) de sécurité à l’école a comme conséquence aux États-Unis.

De plus en plus d’écoles appliquent une “tolérance zéro” et renvoient temporairement des enfants ou adolescents parce qu’ils avaient oublié leur badge, donné un aspirine à un autre élève, pris leur téléphone portable, une paire de ciseaux voire un coupe-ongles

Le nombre d’expulsions est ainsi passé de 1,7 million en 1974 à 3,1 millions en l’an 2000. Pourtant, les statistiques montrent que la violence à l’école a diminué de moitié entre 1992 et 2002.

Dans le même temps, on assiste à une explosion du nombre d’arrestations au sein même des écoles. En cause : le fait que de plus en plus de collèges et lycées emploient des officiers de sécurité scolaires à plein temps pour surveiller ce qui se passe dans les couloirs.

En 2004, le Texas y a consacré 60 millions de dollars et, en 2004, le gouvernement fédéral a dépensé 60 millions de dollars pour embaucher des officiers de police, et 19,5 dans des équipements de sécurité de type détecteurs de métaux.
School to prison Pipeline
La police de New York a quant à elle pris le contrôle de la sécurité des écoles publiques depuis 1998 (qui dénombrent, à ce jour, 1 million d’élèves).

Plus de 5 200 officiers de sécurité scolaire, et 200 officiers de police armés, y ont été affectés, contre “seulement” 3 000 conseillers d’orientation : la priorité relève donc moins de l’éducation que du maintient de l’ordre.

L’ACLU note ainsi que le département de la sécurité scolaire de la police de New York est la cinquième force de police la plus importante des États-Unis, plus importante que celles de Washington, Dallas ou Las Vegas … Or, ils ne sont pas particulièrement formés pour cela.

Alors que les officiers de police suivent un entraînement de 6 mois avant d’aller à l’école, les officiers de sécurité scolaire ne sont formés que pendant 14 jours. Et ils appliquent, au sens strict, la “tolérance zéro”.

Contrairement aux surveillants qui, lorsqu’ils estiment qu’on leur parlent mal ou qu’ils suspectent un manquement aux règles, ne sanctionnent pas les élèves de manière scolaire (colles, conseil de discipline), ils arrêtent les mineurs qui, pour certains, finissent donc en prison, pour d’autres resteront marqués, probablement à vie, par ce qu’ils ont subi.

La majeure partie de ceux qui sont arrêtés ne le sont pas pour des faits de violence, mais pour des “troubles” ou des “perturbations”.

Une criminalisation de l’éducation

L’ACLU évoque ainsi le cas de Daija, 13 ans, traînée par terre par les officiers de sécurité de son école et menottée pendant une heure parce que, effrayée par deux individus, elle préférait attendre sa mère dehors plutôt que de leur obéir en entrant dans l’école.

Ecole, ou prison ?Le jeu décrit aussi l’histoire d’un élève à qui sa mère demande de prendre son téléphone portable afin de pouvoir l’appeler de l’hôpital où sa sœur a été admise après une crise d’asthme sévère. A l’école, le téléphone sonne, un professeur le lui confisque parce que c’est interdit. Le lendemain, il reçoit un courrier où il est écrit qu’en vertu de la politique de tolérance zéro de l’école, il est renvoyé pendant 10 jours.

A son retour, il va discuter, après la classe, avec l’un de ses professeurs pour tenter de récupérer son retard. La cloche sonne. Il est en retard. Dans le couloir, un officier de police lui demande pourquoi, le ton monte, l’élève est renvoyé définitivement. Le fait d’arrêter l’école multiplie par trois le risque de finir un jour en prison.

Et de plus en plus de principaux refusent d’accueillir des élèves ayant précédemment été renvoyés.

Les “programmes d’éducation alternative disciplinaire” (sic), destinés aux élèves qui ont violé la loi, ou le règlement de l’établissement, à partir de l’âge de 6 ans (sauf s’ils portaient une arme, auxquels cas ils peuvent y être envoyé avant l’âge de 6 ans) connaissent un taux d’échec cinq fois supérieur aux autres écoles.

Et la “grande majorité” des mineurs confrontés à la justice n’obtiennent pas de diplômes, et peuvent se voir refuser des prêts étudiants, de licences professionnelles ou de logements publics, du fait de leurs condamnations.

De plus, rappelle l’ACLU, mettre des enfants ou des mineurs en prison n’est pas la solution : à New York, en Floride et en Virginie, 55% des mineurs sortant de prison récidivent dans l’année qui suit.

Rappelant également que les problèmes sont souvent liés à l’état de délabrement des écoles, quartiers, et des problèmes sociaux ou familiaux auxquels sont confrontés les élèves, l’ACLU note également qu’en 2003, la jeunesse afro-américaine représentait 16% des jeunes américains, mais 45% de ceux qui sont arrêtés.

1002nyclu_pub_kyr_police_in_schools.1266414999.gifEt comme il n’existe aucune preuve que les élèves de couleur se comporteraient plus mal que les blancs, c’est donc qu’ils sont punis plus sévèrement, et souvent pour des faits anodins.

De même, alors que les jeunes handicapés représentent moins de 9% des élèves de l’école publique, 32% des jeunes incarcérés sont des handicapés.

Ainsi, les afro-américains handicapés ont trois fois plus de probabilités d’être expulsés que les handicapés blancs, et quatre fois plus de “chances” d’être incarcérés.

Accessoirement, mais cela va de pair, de plus en plus d’écoles sont équipées de portiques de sécurité, de systèmes de vidéosurveillance, et de plus en plus d’élèves sont reniflés par des chiens, et soumis à des fouilles au corps.

Où l’on découvre, aussi, que plus les écoles sont surpeuplées, et moins elles disposent d’argent, plus elles sont équipées de portiques de sécurité. CQFD.

Voir aussi, de l’AcluSchool to prison pipeline, site très complet de l’ACLU de New York,  Criminalizing the Classroom: The Over-Policing of New York City Schools, rapport détaillé de l’ACLU détaillant ce qui se passait à New York en 2007, Policing In Schools: Developing A Governance Document For School Resource Officers In K-12 Schools, les recommandations de l’ACLU, datant d’août 2009.

Sur LeMonde.fr : Violences scolaires : un empilement de mesures plus ou moins efficaces Violence à l’école : depuis vingt ans, une dizaine de plans de prévention pour peu de résultats

> Article initialement publié sur BugBrother


Voir aussi l’intégralité de notre dossier sur le sujet, où il est entre autre question de la mise en place de portiques de sécurité, du fait que la vidéosurveillance est tellement développée, en Grande-Bretagne, qu’on y trouve des caméras, non seulement dans les salles de classe, mais également dans les toilettes de 10% des écoles :

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Grande-Bretagne : 10% des lycées vidéosurveillent leurs toilettes http://owni.fr/2010/04/02/grande-bretagne-10-des-lycees-videosurveillent-leurs-toilettes/ http://owni.fr/2010/04/02/grande-bretagne-10-des-lycees-videosurveillent-leurs-toilettes/#comments Fri, 02 Apr 2010 08:08:35 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=11411 CCTV in this toiletsVladimir Poutine avait déclaré qu’il fallait “buter (les terroristes) jusque dans les chiottes“.

Au Royaume-Uni, un sondage effectué par un syndicat enseignant révèle que 85% des établissement scolaires seraient équipés de caméras de vidéosurveillance, aux abords des établissements, mais également dans les couloirs, dans de plus en plus de salles de classe, et, dans 10% des cas, jusque dans les toilettes…

Une étude révèle que, globalement, les élèves britanniques y sont tout aussi fréquemment vidéosurveillés que ne le sont les prisonniers.

A l’approche des États généraux de la sécurité à l’école, qui se dérouleront à la Sorbonne les 7 et 8 avril prochains, et alors que le gouvernement veut “développer beaucoup plus la vidéosurveillance dans les lycées et aux abords“, il n’est pas anodin de remarquer que, si 60% des lycées d’Ile de France sont équipés de systèmes de vidéosurveillance, dans le Val-de-Marne, les trois dernières agressions d’élèves ont eu lieu dans des lycées… équipés de caméras.

Après m’être penché sur les portiques de sécurité (La taca taca tac tac tiqu’ du portique…), avoir chroniqué les dommages collatéraux engendrés par le déploiement de policiers et d’agents de sécurité dans les écoles américaines (De l’école à la prison, un cycle infernal), il était intéressant de faire le point sur le déploiement de la vidéosurveillance dans les écoles britanniques, pionnières en la matière.

La vidéosurveillance des toilettes fait scandale

En janvier 2009, Jade White, 14 ans, décidait de ne plus retourner à l’école tant que celle-ci ne retirerait pas les caméras de vidéosurveillance installées, juste avant Noël, dans les toilettes des filles et des garçons.

Ses parents la soutenaient, arguant d’une “invasion dans sa vie privée” :

Cette école est pathétique. Ils n’ont pas besoin de mettre des caméras de vidéosurveillance dans les toilettes, et encore moins dans celles d’une école. Toute cette école ressemble à Big Brother. Il y a des caméras partout autour de l’école, à l’extérieur et dans les couloirs.

En réponse, les responsables de l’établissement expliquèrent que les caméras, orientées vers les lavabos, avaient été installées suite à des actes de vandalisme perpétrés par une minorité n’hésitant pas à chahuter dans les toilettes et à gaspiller du savon liquide et du papier toilettes, et que les images ne seraient consultées qu’en cas d’incident :

“Les cameras ont été installées pour le bien des élèves, et sont gérées en prenant avec la plus grande considération la sécurité des enfants.

Les parents attendent de nous que nous gérions les facteurs de risques avérés, et rien ne pourra nous en empêcher.”

Ce n’est pas la première fois que la présence de caméras de vidéosurveillance dans les toilettes des écoles, fait scandale au Royaume-Uni, et les annales de l’Internet répertorient de nombreux autres cas, en 2007, 2006, 2005

CCTV in toilets

Ainsi, en février 2008, une établissement de Plymouth avait accepté de désactiver les caméras des toilettes des élèves après que plusieurs centaines d’entre-eux aient signé une pétition, et refusé de retourner aux WC.

En novembre 2009, la direction d’un lycée irlandais avait de même abdiqué, après deux jours de protestation des élèves et de leurs parents.

Début mars 2010, les élèves d’un lycée de Birmingham ont eux aussi découvert que des caméras avaient été installées dans les toilettes des filles et des garçons, “pour des raisons d’hygiène et de sécurité“.

Des caméras dans les salles de classe

Historiquement, le premier établissement à avoir décidé d’installer des caméras de vidéosurveillance au sein même des salles de classe fut la King’s Academy de Middlesbrough, en 2003.

L’objectif affiché était de surveiller les comportements déviants des adolescents, de protéger l’équipement informatique, et d’aider les enseignants à démontrer leur innocence en cas de fausse accusation.

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Dans cette école, les adolescents apprennent également que les musulmans ont tort, que l’homosexualité est un péché et que le monde a été créé en sept jours. Mais c’est aussi l’un de ceux qui obtiennent les meilleurs résultats du pays…

Depuis, le nombre d’établissements scolaires équipés de systèmes de vidéosurveillance a explosé, et l’on estime que 3500 (un sur sept) utiliseraient également des détecteurs de métaux, cartes d’identité électroniques, ou systèmes biométriques (empreintes digitales, reconnaissances faciales ou de l’iris) afin de “faciliter” certaines opérations administratives telles que le prêt de livres à la bibliothèque ou bien l’accès à la cantine.

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85% des écoles seraient vidéosurveillées

Si certains se targuent de bénéficier du soutien des enfant, de leurs parents, et des enseignants, d’autres ne réagissent pas aussi positivement.

En novembre 2009, la police avait ainsi confisqué des bandes de vidéosurveillance d’une école primaire qui avait filmé des enfants en train de se changer avant un cours d’éducation physique. Faute de vestiaire, ils se changaient dans leurs salles de classe, où sont installées des caméras qui ne sont jamais débranchées.

L’Information Commissioner, l’équivalent britannique de la CNIL, avait alors tenu à rappeler que la vidéosurveillance ne devrait être utilisée qu’en cas d’impérieuse nécessité, qu’elle devait respecter la loi, et qu’elles devaient bien évidemment être débranchées si d’aventure des enfants étaient amené à se déshabiller devant les caméras.

En août 2008, l’association des professeurs et maîtres de conférences (ATL), troisième syndicat enseignant britannique, rapportait que 85% des enseignants interrogés déclaraient que leurs établissements scolaires étaient équipés de systèmes de vidéosurveillance.

Plus de la moitié surveillaient, non seulement les abords de leurs établissements, mais également le comportement des élèves à l’intérieur des écoles, et près d’un quart des enseignants craignaient la présence de caméras cachées, d’autant que 10% précisaient qu’on en trouvait également dans les toilettes de leurs établissements.

Caméras de vidéosurveillance dans un lycée d'Ile de France

De fait, quelques mois après, l’ATL découvrait qu’une caméra espion avait été cachée dans l’horloge de la salle des professeurs d’un établissement de Liverpool. La direction expliqua qu’elle avait été installée suite à un vol, et accepta de la retirer.

Personne ne sait exactement à quoi sert la vidéosurveillance dans les écoles“, estime la secrétaire générale de l’ATL, et plus de la moitié des enseignants interrogés notent que cela n’avait guère modifié le comportement des élèves.

Si 61% estiment cela dit que cela pourrait avoir des conséquences positives, le sentiment général est qu’installer des caméras de vidéosurveillance dans les salles de classe releve d’une atteinte à la vie privée, et va à l’encontre de ce qu’est l’éducation : la vidéosurveillance “ne devrait pas être autorisée en classe, où l’on aurait dès lors constamment le sentiment d’être surveillé et jugé“.

Des caméras… et des micros, qui violent la loi

Chercheuse à l’université de Salford, au Royaume-Uni, Emmeline Taylor s’est intéressée à la surveillance dont font l’objet les élèves de 24 établissements scolaires du nord ouest du Royaume-Uni.

23 des établissement étudiés disposent de plus de 20 caméras de vidéosurveillance. Et 2 des 3 établissements ayant fait l’objet d’une étude approfondie en ont installé dans leurs toilettes.

Un autre en a également installé dans les salles de classe, et les couloirs, le système étant doté de micros. L’équipe éducative est quant à elle équipée d’oreillettes, afin de surveiller, à leur insu, ce dont se parlent les élèves.

Mais, déplore Emmeline Taylor dans le Daily Mail, “rien ou presque n’a été fait pour informer le public, à commencer par les parents, sur la façon qu’ont les écoles d’utiliser ces technologies de surveillance, y compris biométriques“.

Le Guardian souligne ainsi que “la plupart des écoles britanniques violent probablement la loi dans la mesure où elles ne préviennent par leurs élèves que des caméras de vidéosurveillance enregistrent leurs déplacements et conversations“.

“Les jeunes sont certainement la population non criminelle la plus surveillée”

Tout comme en France, il est interdit, au Royaume-Uni, d’installer des caméras sans le préciser à ceux qui sont ainsi surveillés (le fameux “Souriez, vous êtes filmés !“). Mais il est tout à fait légal de vidéosurveiller ou de ficher les empreintes digitales des enfants sans demander le consentement de leurs parents.

Ainsi, les établissements scolaires étudiés se contentent d’avertir la CNIL britannique qui, de son côté, se contente d’exiger que la surveillance se doit d’être “proportionnée au regard des finalités“.

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Une formulation suffisamment vague, estime la chercheuse Emmeline Taylor, permettant aux établissements scolaires de devenir de véritables “bancs d’essais” des nouvelles technologies de surveillance.

Pour Taylor, les jeunes sont ainsi privés de leurs libertés les plus fondamentales, afin de les “habituer à accepter un niveau élevé de contrôle de leurs activités les plus banales, tel qu’emprunter un livre à la bibliothèque scolaire. Les jeunes sont certainement la population non criminelle la plus surveillée” :

Ces technologies ne protègent aucunement les jeunes; a contrario, elles les dépouillent de leur vie privée, minent leur confiance envers les autres en créant une atmosphère de suspicion, ce qui n’est pas tout à fait propice à ce que l’on escompte d’un environnement éducatif.

“Il y en a partout, c’est comme une prison”

Dans le Daily Telegraph, un jeune explique qu’”avec la vidéosurveillance, on a l’impression qu’on ne peut pas nous faire confiance. Dans mon école, il y en a partout, c’est comme une prison.

Shami Chakrabarti, directrice de l’ONG britannique Liberty, se demande pour sa part comment les jeunes pourraient apprendre la notion de respect dès lors qu’ils doivent dans le même temps abandonner toute notion de vie privée, et de dignité, au nom de certaines convenances administratives :

Comment peut-on espérer pouvoir leur apprendre à bien se comporter si la base de cet enseignement repose sur la peur d’être pris ? Faire grandir nos enfants dans un régime de surveillance quasi-carcéral est quelque chose de consternant.

En surveillant les jeunes plus que de raison, avec ces caméras et ces ordinateurs, nous risquons fort de passer à côté de notre devoir, qui doit d’abord être de respecter, et protéger, nos enfants.

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Pour Alex Deane, porte-parole de l’ONG britannique Big Brother Watch, “les écoles sont en train d’immuniser les élèves contre la surveillance” :

Au début, ils disent que les caméras ne sont pas activées, puis qu’elles se contentent de filmer les lavabos. Les élèves t leurs parents commencent alors à se faire à cette idée, et quand les caméras enregistreront des moments plus intimes, il n’y aura plus personne pour se plaindre.

Pour mémoire, le Gixel, groupement des industriels de l’électronique, avait ainsi expliqué, en 2004, dans un Livre non pas blanc mais bleu qui lui servait de “grand programme stratégique” que “la sécurité (étant) très souvent vécue dans nos sociétés démocratiques comme une atteinte aux libertés individuelles, il faut donc faire accepter par la population les technologies utilisées et parmi celles-ci la biométrie, la vidéosurveillance et les contrôles” :

Plusieurs méthodes devront être développées par les pouvoirs publics et les industriels pour faire accepter la biométrie. Elles devront être accompagnées d’un effort de convivialité par une reconnaissance de la personne et par l’apport de fonctionnalités attrayantes :

- Éducation dès l’école maternelle, les enfants utilisent cette technologie pour rentrer dans l’école, en sortir, déjeuner à la cantine, et les parents ou leurs représentants s’identifieront pour aller chercher les enfants.

- Introduction dans des biens de consommation, de confort ou des jeux : téléphone portable, ordinateur, voiture, domotique, jeux vidéo

- Développer les services « cardless » à la banque, au supermarché, dans les transports, pour l’accès Internet, …

Lauréat du prix Orwell de la Novlangue aux Big Brother Awards (BBA) 2004, le Gixel censura son Livre bleu, avant que les BBA ne le remettent en ligne.

Interrogé par un documentariste, le porte parole du Gixel assume totalement cette démarche, au motif qu’ils sont d’abord et avant tout des industriels, au service de la police, de la justice et de l’armée…:

Alex Türk, président de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, se plaît à rappeler que “si vous croyez que le monde ressemblera un jour à celui de Big Brother, détrompez-vous… Vous êtes en plein dedans !” :

Lorsqu’on ne s’étonne plus du traçage, de la vidéosurveillance ou de la conservation des données, c’est justement le signal qu’on est entré dans un monde orwellien.

L’étude de Emmeline Taylor, “I Spy With My Little Eye: Exploring the Use of Surveillance and CCTV in Schools“, devrait être rendue publique en avril prochain, à l’occasion d’une conférence sur la société de surveillance globale“.

jean.marc.manach sur Facebook, @manhack sur Twitter.

Image : vignette coda ; corps de l’article :  issues de l’enquête consacrée à la vidéosurveillance dans les lycées en Île-de-France, et de Students under surveillance, reportage de teachers.tv consacré, entre autres, à un établissement équipé de 100 caméras de vidéosurveillance (à raison de deux par salles de classe, sonorisées), à ces établissements qui identifient leurs élèves par leurs empreintes digitales, ainsi qu’à ces crêches qui permettent aux parents de vidéosurveiller leurs bébés pendant la journée.

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Harry Potter et les présumés pédophiles
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Vos photos sont-elles pédo-pornographiques ?
Un rapport prouve l’inefficacité de la vidéosurveillance

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#Lycees_eu: états généraux de la vidéosurveillance dans les lycées de France http://owni.fr/2010/04/02/lycees_eu-owni-sort-les-cahiers-de-doleances/ http://owni.fr/2010/04/02/lycees_eu-owni-sort-les-cahiers-de-doleances/#comments Fri, 02 Apr 2010 08:07:26 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=11421 10

Cinq jours après son lancement, l’information a été reprise par Le Monde et Rue89, qui ont intégré l’application. France Info, par l’entremise de David Abiker, a également fait une chronique sur le sujet. Malgré ce succès médiatique, les principaux intéressés – les lycéens – sont nettement moins enthousiasmés. Les articles sur le sujet ont été partagés moins de 200 fois sur Facebook. Surtout, les contributions des internautes ont beau être de qualité, à peine 30 ont été récoltées.

Les lycéens représentent une cible difficilement atteignable par les canaux traditionnels. Des idées pour les impliquer dans le projet ?


Lycees.eu

A l’approche des Etats généraux de la sécurité à l’école, qui se dérouleront à la Sorbonne les 7 et 8 avril prochains, et alors que le gouvernement veut “développer beaucoup plus la vidéosurveillance dans les lycées et aux abords“, il n’est pas anodin de remarquer que, si 60% des lycées d’Ile de France sont équipés de systèmes de vidéosurveillance, dans le Val-de-Marne, les trois dernières agressions d’élèves ont eu lieu dans des lycées… équipés de caméras.

Les syndicats, et opposants aux caméras, n’ont de cesse de répéter qu’ils veulent des hommes, pas des portiques, des surveillants, pas des vidéosurveillants, et qu’ils ne comprennent pas pourquoi on vire des êtres humains, sous prétexte de faire des économies, pour les remplacer, soit par des “équipes mobiles de sécurité“, composés d’anciens policiers et gendarmes comptabilisés dans les effectifs de l’Education nationale, soit par des technologies de contrôle et de surveillance qui, souvent, coûtent beaucoup d’argent.

Problème : il n’existe pas de recensement des lycées vidéosurveillés. On sait qu’il y en a de plus en plus, et que le gouvernement veut en vidéosurveiller encore plus, mais on ne disposait à ce jour d’aucun outil permettant de les recenser, de savoir si cela a servi à quelque chose, ou pas, combien ça a coûté, où sont les caméras…

S’inspirant du formidable travail entrepris par ProPublica, une fondation américaine qui finance des journalistes d’investigation parce que “d’intérêt public“, et en vertu du principe de subsidiarité du projet éditorial d’Owni : “Publish the best and Cover the rest /-)” (republie le meilleur, couvre le reste), une partie de son équipe de journalisme de données a donc décidé de se pencher sur le sujet, et de lancer Lycees.eu, afin d’initier des “états généraux de la vidéosurveillance dans les lycées” (et puis de la biométrie, aussi, l’accès aux cantine scolaires étant de plus en plus souvent conditionnée à une prise d’empreinte de la main des élèves).

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Vous y trouverez une carte de France répertoriant tous les lycées, et nous vous proposons de l’”augmenter” de vos témoignages et informations. Vous êtes donc cordialement invités à venir y indiquer si votre lycée est vidéosurveillé, et si oui par combien de caméras, à quel prix, mais également d’y publier des photos des caméras, des bornes biométriques, à nous faire part du nombre de surveillants non remplacés, ou en manque, des problèmes d’insalubrité, d’effectifs, d’encadrements, d’insécurité…

Saisissez-vous de cet outil, faites tourner l’info, envoyez-nous vos photos, contribuez au débat : les Etats généraux de vos lycées ont déjà commencé.

A la manière des cahiers de doléances qui permettaient au peuple de faire connaître ce qui n’allait pas, ainsi que leurs propositions d’amélioration de la situation, nous aimerions modestement pouvoir ainsi contribuer au débat public. Pour contribuer, c’est par là : Lycees.eu.

Voir aussi l’intégralité de notre dossier sur le sujet, où il est entre autre question de ces adolescents envoyés en prison, aux États-Unis, parce que des policiers y ont remplacé les surveillants, du fait que la vidéosurveillance est tellement développée, en Grande-Bretagne, qu’on y trouve des caméras, non seulement dans les salles de classe, mais également dans les toilettes de 10% des écoles :

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Design et image d’illustration Loguy

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Portique ta mère http://owni.fr/2010/04/02/portique-ta-mere/ http://owni.fr/2010/04/02/portique-ta-mere/#comments Fri, 02 Apr 2010 08:00:19 +0000 Admin http://owni.fr/?p=11453 2959643757_79299e80cb

Attention, si vous passez avec un coupe-ongle, vous risquez la prison

C’était il y a bientôt un an. Vendredi 15 mai 2009, une enseignante était poignardée par un élève au collège de Fenouillet, en Haute-Garonne. Le processus classique lorsqu’un acte de violence est commis dans une enceinte scolaire s’est alors mis en branle : visite du ministre de l’Éducation Nationale du moment et annonce de mise en place de dispositifs sécuritaires.

En l’occurrence, Mr Darcos s’était fendu d’une de ces déclarations :

Vous ne réglerez pas avec un demi-poste de surveillant de plus le fait qu’un enfant de 13 ans arrive avec un couteau pour frapper un professeur alors qu’on n’a aucun signalement de violence.” Il a donc été décidéd’examiner toutes les solutions possibles : on peut imaginer dans certains établissements des portiques, des systèmes de fouille. Nous verrons. Les collectivités territoriales estimeront peut-être que dans certains établissements, c’est une réponse possible.

Les portiques de sécurité, une réponse possible pour enrayer la violence à l’école ?

Effectuons tout d’abord un calcul (relativement) simple.

Le collège François Mitterand de Fenouillet accueille quotidiennement 634 adolescents. Le passage par un portique de sécurité durant en moyenne une trentaine de secondes, il faudrait 5 heures pour que l’ensemble des élèves soient contrôlés.

Le collège va devoir  se doter de plusieurs portiques. Disons 20, pour que les collégiens puissent rejoindre leurs classes en un quart d’heure. Le calcul porte alors sur l’économie d’une telle mesure. Un portique coûte en moyenne entre 6.100 et 38.000 euros hors taxes. Il faut encore ajouter le personnel nécessaire au bon déroulement de la procédure de contrôle (vigiles et personnel qualifié).

On arrive alors à 400.000 euros d’achat de matériel (20.000 x 20) et à 204.000 euros pour les surveillants (soit un SMIC pour 40 vigiles à quart-temps sur un an). Sans compter l’achat des scanners à rayons X et la maintenance de toute cette machinerie.

Imaginons à présent que la proposition de Xavier Darcos ait été suivi d’effet, et que le collège François Mitterand se soit doté d’un tel attirail. Rien n’empêche un élève de récupérer un objet balancé par un complice au-dessus d’une des nombreuses barrières qui encerclent l’établissement. Alors quoi ? On rehausse les barrières, on ajoute quelques miradors et on transforme l’école en prison ?

Avant d’en arriver là, d’autres solutions sont envisageables… Lorsque l’on sait que le collège François Mitterand compte un pion pour 100 élèves, on se dit que la solution pourrait être plus simple : augmentation du nombre de surveillants, d’encadrants, de profs …

Un lycée ou une prison? Un lycée.

Un lycée ou une prison? Un lycée.

Cette démonstration tend à prouver l’absurdité d’une telle mesure, et son inefficacité. Les discours sécuritaires mobilisés par les représentants de l’État à la suite de faits divers sont le plus souvent liés à des considérations électoralistes (en l’occurence, les européennes).

En faisant réagir les parents d’élèves, les associations de défense des droits de l’Homme et les partis concurrents, le ministre était ainsi parvenu à remettre le thème de la sécurité au centre du débat, ce qui, en d’autres temps, avait profité à l’UMP et à son leader.

A force de répétition, les thématiques sécuritaires envahissent le débat public. Jusqu’à organiser, en Sorbonne, des États Généraux de la sécurité à l’École, auxquels la soucoupe se propose de contribuer, à a façon /-)

> Article fortement inspiré de “La taca taca tac tac tiqu’ du portique” sur Bug Brother

Voir aussi l’intégralité de notre dossier sur le sujet, où il est entre autre question de ces adolescents envoyés en prison  aux Etats-Unis, parce que des policiers ont remplacé les surveillants. Du fait de la vidéosurveillance tellement développée, en Grande-Bretagne, on trouve des caméras, non seulement dans les salles de classe, mais également dans les toilettes de 10% des écoles :

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Copiez simplement le code suivant:

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Le widget ressemble à cela


Vous pouvez également embarquer l’application complète dont le code est le suivant :

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